Qualité de vie au travail (QVT) et santé-sécurité.

2nd article des étudiants en M2 IHIE – promotion 2020-22

La qualité de vie au travail dit QVT correspond globalement aux éléments renseignés sous le « bien-être au travail ». La QVT regroupe l’ambiance, la culture de l’entreprise, les conditions de travail et la motivation professionnelle pour le travail. Il est perçu de deux manières, individuellement et collectivement via les relations et échanges entre salariés…

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Les aspects économiques (mondialisation, concurrence), sociologiques (valeurs personnelles éthiques ou morales face aux pratiques de l’entreprise) et environnementaux (changement climatique) jouent aussi sur la QVT. Cette partie me semble important car la QVT est intra et extra professionnelle (on attend parfois, de l’entreprise, des réponses à des éléments extra-professionnels ce qui n’est pas évident pour toutes les entreprises et donc les managers!)

Introduction

Contexte

Selon l’Anact, dans le Guide de la qualité de vie au travail outils et méthodes pour conduire une démarche QVT, « La QVT est d’abord une façon de construire et de conduire l’action collective qui permet d’articuler les objectifs d’amélioration des conditions de travail et ceux de qualité de service rendu aux usagers. » (on parle désormais de QVCT dans certaines références) – Mon avis personnel est que nos orientations entre les éléments de conditions de travail des années 80-90 ont très peu évolué, seul le nom a changé …


Le Code du travail, à travers les articles L4121-2 et L4121-3, impose à l’employeur d’avoir un Document Unique intégrant les risques psycho-sociaux (ex : mode de management, ressentis exprimés ou non des équipes sur la pression, les tensions, les degrés de liberté, l’initiative, …) et les risques physiques (ex : bruit, chimique, atmosphérique) qui font partie intégrante de la QVT.

L’accord du 29 janvier 2021 relatif à la qualité de vie au travail aborde la notion de référent QVT, la volonté de renforcer l’observatoire de la qualité de vie et des conditions des travail via l’accord sur les conditions de vie au travail de 2016. Cet accord vise également à capitaliser les pratiques QVT, diffuser et sensibiliser les cultures QVT auprès de tous les acteurs. La loi Rebsamen adopté le 17 août 2015 traite quant à elle de la représentation du personnel, le dialogue social et la négociation annuelle obligatoire. La négociation annuelle passe par trois parties :

  • La rémunération, le temps de travail et intéressement, épargne salariale ;
  • La qualité de vie au travail avec la protection de l’égalité homme / femme, pénibilité, handicap ;
  • La gestion des emplois et des parcours professionnels avec carrière des salariés qui exercent des responsabilités syndicales

Les indicateurs QVT au sein d’une entreprise peuvent passer par un baromètre social, les chiffres du turn-over, les discussions terrains.

https://www.legifrance.gouv.fr/conv_coll/id/KALITEXT000043918602?origin=list&facetteEtat=VIGUEUR&facetteEtat=VIGUEUR_ETEN&facetteEtat=VIGUEUR_NON_ETEN&facetteTexteBase=TEXTE_BASE&init=true&page=2 ( accord du 29 janvier 2021 relatif à la qualité de vie au travail )

L’animateur HSE peut se placer comme garant de la Qualité de Vie au Travail dans l’entreprise en travaillant en collaboration avec les différents services tels que la Direction, les Ressources humaines, la Sécurité, la Maintenance et la Production. Un certitude réside dans le fait que la QVT est avant tout affaire de transversalité et de compréhension par toutes les strates managériales. L’engagement d’une équipe de direction n’est pas négociable tout autant que le partage de certains objectifs avec des IRP.

Problématiques

  • Peut-on engager une démarche en QVT lorsque les fondamentaux en termes de prévention et de SST ne sont pas encore consolidés ? Quels risques / bénéfices encourent-on ?
  • La course à la certification garantit-elle un réel apport ou bien ne risque-t-elle pas de masquer certaines problématiques SST fondamentales ?

Enjeux

Forces

La qualité de vie au travail influence à la fois les résultats de productivité et de présentéisme.

Un salarié qui est bien dans l’entreprise a plus envie de rester et en toute logique s’implique d’avantage. il véhicule également une image positive de l’entreprise. Il convient de prêter attention aux faits tout autant qu’aux ressentis. C’est le point d’attention de l’implication voire l’engagement des salariés : Comment collecter une information factuelle et fiable sur les sujets de QVT ?

Les faiblesses

Le manque d’implication/engagement de l’employeur / équipe de direction est un frein à tout développement durable en QVT.

Les insuffisances voire l’inexistence de mesures mises en place pour améliorer les conditions de travail (on ne peut pas tout baser sur le comportement des opérateurs).

Attention à éviter une QVT de façade sans engagement financier. A l’instar des ROI mesurés en S&ST, les investissements sont rentables en prévention tout comme en QVT.

Opportunités

Une meilleure qualification du système Responsabilité Sociétal des Entreprises (RSE) => Une bonne QVT en entreprise permet à cette dernière de se fixer puis atteindre des objectifs ambitieux et mesurer ainsi les étapes parcourues. (pourquoi ne pas aller jusqu’à la mise en place des certifications ISO pour disposer d’une preuve du chemin parcouru ?)

Menace

En cas de mauvais climat dans l’entreprise, le taux d’absentéisme peut être élevé ainsi que les démissions, ce qui peut être un frein pour la productivité mais aussi pour l’attractivité de l’entreprise.

Quels sont les domaines qui touchent la QVT ?

Approche physique

La QVT se traduit souvent par de bonnes conditions de travail. Il s’agit de s’assurer ainsi de la prise en charge des risques tels que le bruit, les produits chimiques dangereux et le risque de troubles musculo-squelettiques …

Par exemple, selon une étude dans la vidéo : Pourquoi se protéger du risque chimique ?

Dr Anne ROUCHE-HIEYTE, (Médecin du travail au SSTRN), « 10 % des salariés sont exposés à au moins un produit cancérogène ». Les effets sur la santé sont nombreux. Cela va des sensations d’irritation aux cancers qui apparaissent souvent tard. Elle prévient sur l’importance du suivi post exposition.

Su un second témoignage, dans la vidéo « Témoignage d’une entreprise confrontée au risque chimique » Gwenola BOUDIN (Assistante commerciale à l’Atelier du Siège) , aborde l’évaluation du risque – entreprise de sellerie générale et de tapisserie – . Suite à une analyse des risques, l’entreprise s’aperçoit qu’elle utilise un produit CMR. Pour y remédier, elle a travaillé avec le SSTRN et la CARSAT. Ils ont mis en place trois actions : substitution du produit chimique pour un produit moins nocif pour l’homme et l’environnement / sensibilisation des salariés sur les consignes de sécurité et sur le port des équipements / amélioration de la ventilation des salles de colles. les implications conjointes (CARSAT, SSTRN, employeur, salariés) ont permis une amélioration des conditions de travail.

Autre exemple avec AG Métal : Lors de la création d’une entreprise, le dirigeant a contacté la CARSAT et partir sur des bases de prévention solides dès le début. Il s’est centré sur la QVT au sens large (managers et personnels de terrain) :

  • Le modèle standard des établis a été réalisé via des croquis et les échanges d’idées de tout le monde, en collaboration avec la CARSAT
  • Eclairage : les normes se basent sur 500 lux dans ce type d’atelier. (Le choix a été de monter à 600 lux pour un meilleur confort visuel).
  • Le Document unique est réalisé de manière collégiale. Les chefs de projet peuvent être un apprenti autant que le dirigeant. Les actions sont transcrites dans le DU et chaque collaborateur devient responsable d’une ou plusieurs actions.

Pour AG Métal, ce mode de fonctionnement permet de maintenir une bonne qualité de vie qui s’exprime notamment à travers un turn-over nul et par la motivation de chacun à venir travailler.

Approche mentale / psychologique

Depuis l’accord cadre du 27 octobre 2013 sur la prévention des RPS, il est devenu obligatoire pour les employeurs d’établir un plan de prévention des RPS. Ce plan doit être intégré au DUER.

La mise en place d’une démarche QVT en profondeur permet de mener des actions préventives primaires. Ces actions visent à éviter la survenu des événements en agissant sur les causes profondes des risques professionnels. Pour les RPS, un diagnostic est nécessaire avant toute action.


Dans le milieu professionnel, l’expression des difficultés du travail quotidien ressenties n’est pas toujours autorisée (bien perçue) – cf article sur les émotions au travail (https://blog.griphe-conseil.fr/2020/09/les-emotions-au-travail-par-thomas-bonnet/) . Dans ce contexte, favoriser l’expression des agents sur leur travail devient un levier majeur d’amélioration de la qualité de vie au travail. En effet, la démarche QVT montre à quel point il est important de rendre possible l’expression des salariés sur le contenu et les conditions de leur travail dans un cadre sécurisé. La possibilité d’expression permet de mettre en place des actions d’amélioration. Ces dernières doivent permettre d’éviter d’autres dysfonctionnements plus sévères autour des RPS (absentéismes, dégradation des conditions de travail => conduisant à des mauvais résultats, …).

Exemple :

Eléments ARACT Haut de France : Amélioration de la QVT chez LEROY MERLIN en mettant en place des actions de prévention grâce au dialogue social. En effet, afin de lutter contre les RPS, le CSE a mis en place des questionnaires pour permettre à 1600 salariés du siège d’exprimer leurs craintes et leurs besoins. Les résultats de ce questionnaire ont permis d’identifier le besoin en matière de sens et de motivation des salariés afin de leur permettre de continuer leurs efforts et d’être reconnus. Grâce à cet échange avec les salariés est né la forme de BEST FORUM qui a été mis en place en partenariat avec un formateur spécialiste dans la prévention des RPS de la société FORHUMAN.

Ce BEST FORUM a évolué au fil des années suite à la demande des salariés à travers une enquête qui est diffusée chaque trimestre.

Evolution du best forum au sein de Leroy Merlin (Aract Haut de France)

Ce BEST FORUM a permis aux salariés d’’avoir le sentiment d’une certaine reconnaissance. Il aide, a priori, également à simplifier les relations inter-collègues. Il a permis également d’augmenter de 12% le taux de satisfaction des salariés dans l’entreprise.
La réussite des actions engagées s’est concrétisée grâce à une coopération interne plus large (accompagnement des infirmières, du médecin du travail, des employeurs et des salariés).

Cet exemple montre l’importance du dialogue et de la prise en compte des craintes de chacun au quotidien afin d’améliorer les conditions de travail et garantir une bonne QVT au sien de l’entreprise.

En quoi les certifications peuvent impacter la QVT ?

Ex : 45001 exigences de la norme sur la QVT
Comment prendre en compte la QVT lors de la mise en place d’une certification ?

REX sur le fonctionnement à d’un centre de maintenance

Le responsable HSE = Conseiller à la Sécurité du site (COSEC), est le garant de la QVT au sein des unités.

Il existe 5 unités :

  • Maintenance
  • Logistique
  • Opérationnelle
  • Opérationnelle
  • Transverse : RH, QSE, direction etc..

Dans chaque unité il y a plusieurs équipes dirigées par des Dirigeants de proximité = chefs d’équipes.

Pour chaque unité, il existe un cadre rattaché au directeur de l’unité, s’occupant de la coordination de la production.

Ce cadre fait office de CORSEC (Correspondant sécurité) : c’est le correspondant du COSEC dans les unités. Parmi les missions dans sa fiche de poste le/la CORSEC doit garantir plusieurs paramètres de la QVT dont la remontée terrain qui doit se faire une fois par semaine.

Au-delà de l’aspect organisationnel, des mesures techniques sont mises en place du type : installation, bâtiment, activités etc…

Cela découle d’un plan d’actions qui se base principalement sur les remontées terrain ainsi que les baromètres sociaux. Ces derniers sont élaborés au niveau national. L’enquête menée sur tous les sites de France permet d’avoir une vision globale sur le niveau de la QVT de la filiale de cette entreprise.

Les résultats mènent, comme précisé précédemment, à un plan d’actions qui descend au niveau du site. Le responsable HSE adapte donc les actions aux remontées et les attribue aux personnes concernées.

Un suivi d’effectivité des actions est réalisé et cela se confirme souvent durant les enquêtes suivantes.

NB : Les chefs d’équipes sont garants de la diffusion de l’information aux agents pour répondre aux questionnaires nationaux. Le taux de participation n’est jamais descendu en dessous de 90%.

Solutions pour améliorer la QVT

Penser QVT dès l’arrivée d’un nouveau salarié pour faciliter son intégration en lui confiant des objectifs précis, voir si son espace de travail lui convient et pérenniser un échange durable.

Afin d’améliorer la qualité de vie au travail il est possible d’aménager des espaces de détente (ex : salle de sieste), conviviaux ou des activités (ex : méditation, yoga, atelier sur la gestion du stress) pour se relaxer lors des pauses. Cela passe aussi par l’amélioration de l’espace de travail avec un bon aménagement des locaux ou des ateliers.

Une routine quotidienne peut être mise en place pour connaître l’état d’esprit des salariés et adapter sa communication / être à l’écoute.

Avec le télétravail, certains collaborateurs ont eu des difficultés à séparer vie professionnelle et vie personnelle. Un blocage des serveurs informatiques en dehors des heures de travail peut faciliter le droit à la déconnexion (en l’imposant). L’isolement ressenti de certains télé-travailleurs peut être rompu par des moment conviviaux (pause café virtuelle, escape game, …).

L’appartenance à l’entreprise est l’un des piliers de la QVT côté employés. Partager les mêmes valeurs, comprendre son rôle dans la chaîne de valeur, intégrer la nécessité des différentes fonctions (prod / support), …, sont autant d’éléments qui sont le refletd’un certain niveau de qualité de vie au travail.

(mon avis est qu’il faut prêter attention aux entreprises qui rédigent leurs valeurs à travers un groupe de travail. Lorsqu’une entreprise en est à ce stade, les éléments de QVT sont souvent mis à mal. Les valeurs sont un résultat et non une donnée d’entrée, elles se vivent au quotidien et ne se décrètent pas, …)

En complément, il faut que les salariés puissent s’exprimer directement ou indirectement à travers des questionnaires, boîte à idées avec un retour sur ces projets pour se sentir valorisé.

Un système de management SST ainsi qu’un management transversal accompagné peuvent aider à l’amélioration de la QVT. Le point d’attention résidera comme bien souvent dans l’engagement du dirigeant, de l’équipe de direction et des actes forts plutôt qu’un long discours. Aussi, à ce stade, les équipes pourront se sentir dans un environnement favorable aux expressions et à la prise en compte des éléments de QVT à travers une approche systémique.

Merci à Oulayya ZIDANI, Mohamed Salah BOUZIDI et Mathilde MESSIER @IHIE promo 2020-2022

Jerome ALLAIRE

Sources :

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