Accidents du travail – des morts dont on ne parle pas !
Le 21 décembre dernier, Welcome To The Jungle relayait l’interview de la sociologue Véronique DAUBAS-LETOURNEUX suite à la sortie de son livre à l’automne 2021 (image ci-dessous)
Je vous laisserai lire l’ensemble de cet interview grâce à ce lien. J’ai plusieurs certitudes et avis convergents face aux éléments qui ressortent de cet interview :
1 – Pas de moyen unique de recensement des AT
Les décès ou les accidents avec arrêt sont, en France, sous-évalués : à juste titre, il n’existe aucun moyen unique de recenser l’ensemble des sinistres corporels qu’ils soient de la fonction publique, des activités agricoles (MSA), des activités des indépendants et de la CNAM TS. Nous sommes incapables d’une transparence complète face à un enjeu fondamental.
2 – Les accidents sont multifactoriels
Les accidents sont multifactoriels et les réduire à un comportement humain est une grave erreur. Les accidents sont le fait des organisations, des choix et très rarement consécutifs uniquement d’un dysfonctionnement technique. Le rôle du futur accidenté, de première ligne, est toujours celui qui pâti de l’accident. Les analyses concrètes doivent aider à recenser les faits et analyser les causes.
3 – Inégalité face aux accidents
Nous ne sommes pas tous égaux face aux accidents. La surreprésentation des personnes faiblement qualifiées, des nouveaux sur leurs postes,…, sont des constantes qui bougent peu depuis de trop nombreuses années. L’accueil et la formation au poste de travail sont deux leviers essentiels à la réussite de l’évitement de cette sinistralité.
Les organisations du travail (process, flux, RH, …) sont des éléments indissociables pour réduire cet écart face à l’accident.
4 – Des jours perdus trop nombreux
Les accidents sont moins nombreux mais ils sont plus graves. Plus de 40 millions de jour perdus chaque année pour des accidents de moins en moins nombreux. On prend moins de temps à former, on va plus loin dans la durée du travail, l’adaptation est de mise, … autant de facteurs qui augmentent les possibilités de se trouver dans une situation à risque et de se trouver au contact d’un risque. (près de 10 Millions de jours perdus suite à MP/an!)
5 – Augmentation des troubles psycho-sociaux
Les troubles psycho-sociaux sont en augmentation. C’est une certitude que je confirme de manière empirique à travers les échanges du quotidien depuis le début de la crise sanitaire. La « stabilité » psychique est une pièce centrale du puzzle travail. Elle est pourtant mise à mal par les modes de management de les stratégies d’entreprises du juste à temps et parfois du Lean (mal mis en œuvre). Les solutions toutes faites en matière de management reviennent à la grande idée des usines clé en main que les français voulaient implanter en Afrique dans les année 80. Le management requiert un effort et cet effort tient aux équipes et à la culture d’entreprise.
6 – Une double peine
La qualification d’accident du travail est une double peine. Cette double peine est celle du salarié touché mais également parfois celle de l’entreprise qui refuse cette qualification. La course au « zéro accident » pousse aux excès malheureux de certains entreprises à l’aménagement de poste à tout prix. Le compte n’y est pas … on se retrouve petit à petit avec une sous-déclaration des événements et potentiellement une sous-considération de ceux-ci menant à une banalisation du risque et une fracture de perception entre le management et les opérateurs de premier rang. L’Homme n’est pas exempt d’erreur toutefois l’accident relève d’une multitude d’erreurs ponctuelles ou latentes qui mènent à l’événement non souhaité.
7 – L’établissement de norme pour un travail prescrit face au réel
Les normes ne sont pas établies par ceux qui connaissent le travail : C’est une réalité, dans les normes et les règles il y a une part de protection et une part de lobbying aussi on côtoie le pire et le meilleur. Une norme est un travail qui n’existe pas par essence. Il correspond à un prescrit. Les normes spécifiques machines sont écrites en partie par ceux qui les conçoivent mais pas les utilisateurs …
Conclusion
Pour une fois je vous évoque un livre sans l’avoir lu, il me reste à l’acquérir pour compléter cette approche basée sur mon expérience en écho à un article médiatique. Les décès au temps et au lieu du travail sont une tragédie.
Même si la majorité des événements liés au travail sont associés aux trajets / déplacements l’accident est une réalité douloureuse à laquelle je me suis confronté de trop nombreuses fois.
Je vous laisse prendre connaissance de l’interview évoqué en début d’article. je vous partage le lien vers l’émission de France culture de novembre 2021 :
Belle semaine
Jérôme ALLAIRE