Le jour où j’ai perdu mon premier point sur mon permis
Nous avions en France, et ce, de longue date, des règles concernant les vitesses limites à respecter selon le type de route.
Les limitations de vitesse avaient été instaurées à l’époque de la chasse au Gaspi dans le cadre du premier choc pétrolier de 1973.
Les limitations ont peu évolué depuis cette époque. La population française a, elle, peu ou prou augmenté de 50%. Quant au nombre de véhicules, je ne saurais vous dire mais il a sans doute plus que doublé.
De nombreuses autoroutes ont été construites ou finalisées (pour mémo en 1967, la France ne compte de 1000km d’autoroute, le réseau est de près de 9000km aujourd’hui).
Le permis à point a été instauré au début des années 1990 et il est réellement appliqué depuis le début des années 2000.
12 points pour avoir le droit de conduire. Si on perd quelques points, il est possible de suivre un stage avec présence obligatoire d’un psychologue dans les rangs pour comprendre notre philosophie et notre rapport à la conduite (nous ne sommes ni allemands, ni espagnols, et ça, il faut l’intégrer !!!). pour mémo dans d’autres pays, on part de zéro point et on augmente son capital selon ses bonnes pratiques.
Depuis le 1er juillet 2018, le 80km/h est de mise sur la majorité du réseau secondaire en France. Rat des villes ou rat des champs, l’impact concerne essentiellement nos campagnes impossibles à quadriller en matière de contrôle.
Aujourd’hui, je prends ma moto pour aller rejoindre des amis à une centaine de km de mon domicile. La veille j’ai cherché un itinéraire bis sur les cartes pour éviter les longues lignes droites à 80km/h que je redoute. Après de vaines recherches, je me replie sur mon trajet habituel car il semble le seul viable sauf à faire des détours impressionnants tout en ayant l’obligation de passer sur ces longues lignes droites.
Je pars et me cale à un peu de plus de 80km/h au compteur, ma femme qui m’avait suivi en voiture m’avait indiqué que j’étais largement sous la vitesse autorisée (selon son compteur !). A vrai dire, je me dis que le plus simple est de suivre un train de voitures, comme ça je ne me soucie pas du compteur.
Ceux qui font de la moto comprendront … Il est difficile, contrairement à la voiture de rester concentré sur la route tout en regardant le compteur (il faut baisser la tête et donc quitter la route des yeux…).
Ça me semble un peu lent mais les premiers 30km se passent bien. Je suis dans le flot de circulation avec l’avantage de ne pas avoir le nez sur mon compteur en permanence. Au passage d’une ville et des différentes voies à suivre, je me retrouve seul, j’ose dire sans repère. Dans ce cas là je fonctionne en général « aux vibrations ou au bruit » moteur. Mais il est vrai que je suis un peu perdu avec ce changement de limitation car je dois me caler sur un nouveau référentiel et je jongle encore trop souvent en 5è et 6è. Mon compte-tour me sert de référence et je trouve une vitesse de croisière normale sur ces longues lignes droites.
Oups ! surprise, un camping-car me double… je regarde mon compteur et je suis à la vitesse qui me semble adaptée. Par acquis de conscience et vraiment par mauvais réflexe, je me cale derrière ce véhicule pour avoir une idée de sa vitesse. Mon compteur affiche près de 100km/h puis je reviens à ma routine en laissant filer cet abruti !
Mais en revenant à ma vitesse précédente, je m’aperçois qu’un camion me semble se rapprocher dans mon rétroviseur ??? Mon compteur est à près de 90km/h, je suis un peu paumé. On a beau être motard, le plaisir fait partie de cette conduite et là, je commence à être tendu.
Déjà que la conduite à moto demande une attention de son environnement plus importante qu’à voiture (les motards se reconnaîtront). Je dois, en plus me soucier désormais des véhicules qui me suivent. Le plaisir m’amène du stress (F..s C…r !).
Et de fait, le PL s’approche inexorablement de ma roue arrière.
L’abruti que je suis augmente son allure de quelques km/h pour garder le large et c’est le drame… Après plus de 25 ans de permis, le flash !!!
Bonjour M. l’agent, ben oui, c’est ma faute, c’est ma très grande faute…
Je n’en peux plus. J’ai envie de crier à l’injustice et de balancer ma moto dans le fossé.
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J’ai roulé en deux roues en Espagne, en Allemagne, en Suisse. Je n’ai pas honte d’indiquer que j’ai taillé la route à des vitesses inavouables en France sur les autoroutes allemandes. Mais la courtoisie et le respect de l’autre sont plus grands. Vous pouvez rouler très vite un instant et l’instant d’après vous caler à la vitesse indiquée car il y a des travaux « wir bauen für sie ».
En France, dans les zones de travaux, j’ai l’impression d’être parfois le seul idiot à réduire ma vitesse !
Est-ce un coup de gueule ou un constat, c’est en tout cas un point de vue personnel d’une histoire qui aurait pu m’arriver la semaine passée car j’ai toujours mes 12 points mais je reste tendu depuis 2 mois. Je me surprends à dépasser régulièrement la limite autorisée alors que précédemment ce n’était pas le cas. Jamais un camion ne m’avait doublé et ça m’est arrivé !
Étant préventeur, je ne suis pas contre la réglementation, ne vous méprenez pas.
Je suis pour une réglementation appliquée car contrôlée. Mieux vaut moins et mieux qu’un cumul de règles jamais vérifiées.
Je fais volontiers le parallèle avec le rapport de Madame Charlotte LECOCQ, Députée du Nord sur la santé au travail remis cette semaine.
On y parle de culture de prévention. J’ai plus de convictions que de certitudes… Mais l’une de ces rares certitudes réside dan l’incompatibilité du développement d’une culture de prévention avec l’approche exclusivement réglementaire à la française sur ces sujets.
jérôme