Mise à jour d’un article du 18 octobre 2018
Avec la crise actuelle, les infirmier(e)s sont au front même si la tension est moindre depuis quelques jours.
Il y a maintenant 2 ans, j’ai réalisé 3 jours de formation en sous-traitance pour un partenaire et les problèmes sont toujours d’actualité. Au cœur d’un cursus de 10 jours j’intervenais sur la partie prévention à destination d’infirmier(e)s de santé au travail néophytes.
J’étais face à un groupe de 10 personnes et parler industrie ou prévention à des personnes sortant du secteur hospitalier c’est un peu comme si on me parlait de protocole de soins… Heureusement, elles étaient 3 à avoir déjà mis les pieds sur des remplacements en milieu industriel.
« J’apprends petit à petit à connaître l’équipe composée de 9 femmes et d’un homme. Une participante note chaque acronyme, une autre note toutes les questions particulières pour y revenir plus tard… nous prenons notre rythme.
Comme d’habitude, je suis ravi de transmettre à d’autres et d’échanger sur des points de vue, des pratiques différentes.
La pause du premier midi (pour moi) est animée, c’est le quatrième jour de formation pour elles et lui, et la fatigue se fait un peu sentir.
Je prends part aux discussions et très vite je m’en retire. J’écoute, j’entends, j’apprends des expériences aux urgences, en psychiatrie, en neurochirurgie, … Elles sont toutes passionnées par leur métier et pourtant elles sont en cours de changement d’orientation (j’utilise « elles » le seul homme de la session était, ce midi là à l’autre bout de la table). Elles évoquent des situations passées avec plaisir et j’écoute avec attention ces échanges sur leur travail.
Je ne me pose pas la question très longtemps de ce qui les pousse à vouloir changer. Je comprends petit à petit qu’un déséquilibre s’est formé entre leurs visions du métier et la réalité quotidienne. Ce fossé est devenu un gouffre au fur et à mesure de leurs avancées professionnelles. »
Elles dépeignaient une situation qui reflète ce que nous entendons dans les médias depuis plusieurs mois.
Cette plainte lointaine, nous a éclaté au visage en mars.
Les manques de moyens autant humains que techniques ont fait resurgir les gros dysfonctionnements au sein des centres hospitaliers sur les conditions de travail de nos soignants (manque de temps, absence de reconnaissance, des heures rarement récupérées ou payées, des individualités grandissantes, …).
Quel gâchis ! nous cherchons des aidants, des soutiens et nous les maltraitons.
Que beaucoup découvrent la place centrale de nos soignants seulement lors d’une crise est décevant.
J’étais ravi d’avoir de nouve(lles)aux collègues mais également très déçu de ce sentiment de mal être qui était présent déjà bien avant la crise actuelle.
Aucun(e) d’entre eux(elles) ne connaissait des éléments de prévention des risques professionnels malgré parfois plusieurs dizaines d’années d’exercice. Il semble (c'est peut-être un raccourci) que c’est un non-sujet dans la fonction publique hospitalière, à de nombreux endroits.
Travailler à la santé de nos corps médicaux et para-médicaux ne doit pas être une option. Leur santé est également notre santé.
Ce billet d’humeur reprend avec quelques modifications, la publication du 18 octobre 2020. Bastien, travaillant avec moi, l’a repris et complété. C’est donc un article co-écrit.
Les échanges de ces deux jours m’avaient permis de découvrir une réalité qui n’était pas la mienne et qui a éclaté au grand jour trop récemment.
Alors plutôt que taper dans les casseroles, soyons respectueux et respectueuses de leur travail et restons toutes et tous attachés à notre corps médical et para-médical.
Merci et à votre écoute
Bastien et Jérôme