L’un des abonnés au blog m’a posé une question il y a un mois et je n’ai pas pris le temps d’y répondre…
Cette personne travaille dans une entreprise de forage pétrolier qui vit chaque jour des accidents et incidents malgré une campagne de sensibilisation présente et des « safety meeting » chaque matin ainsi que flash info et retours d’expériences.
La question est très ouverte et le contexte peu détaillé aussi, je me suis posé une question : de quelle manière répondre le plus précisément ?
1 – Diagnostiquer :
Un état des lieux me semble nécessaire. Il est soit réalisé en interne soit par un consultant externe. Ce diagnostic est nécessairement très ouvert dans son approche. Il aborde les obligations réglementaires autant que les pratiques managériales des dirigeants comme des encadrants de terrain.
Une analyse particulière est à mettre en œuvre sur l’appréciation des messages sécurité par les opérateurs de premiers rangs (contrainte, obligation, intérêt, lassitude, …) ainsi que sur leurs pratiques quotidiennes pouvant dériver vers des événements non souhaités (signaux faibles ou non!)
Il me semble ici, indispensable de réaliser cette approche globale de la direction aux opérateurs de terrain et sur les axes techniques, organisationnels et humains.
Cet état des lieux devra permettre de tirer des enseignements sur :
- La formation des personnes
- Le matériel utilisé (adéquation ou non)
- Le sens donné au travail et à la prévention
- Le fatalisme perçu ou non des accidents
- L’engagement au plus haut niveau
- L’engagement des encadrants, …
(Voir pour plus de détails mon site www.griphe-conseil.fr )
2 – Sensibiliser et décider au plus haut niveau
Les actions terrain ne valent que par le soutien qui leurs est donné au plus haut niveau.
Aussi, avant toute action, l’exemplarité est de mise et elle se traduit par une voie tracée de l’encadrement et communiquée largement. Selon l’entreprise et son contexte, cette action peut se faire à différents niveaux.
Toutefois, cet objectif transmis au sein de l’organisation est un point d’appui indispensable à la cohérence des actions futures et le sens donné.
3 – Faire s’engager tous les encadrants
Une phase de partage des objectifs permet aux encadrants d’échanger sur les approches individuelles pour aller vers l’acceptation d’un consensus collectif du risque. Il convient ensuite d’amener chaque encadrant à se positionner sur un objectif valorisant son engagement et qu’il réalise de manière simple. On peut s’engager sur un changement de comportement par ex. Il n’est pas nécessairement communiqué aux équipes. L’important est qu’il soit visible au quotidien et tenu dans le temps.
4 – Si des écarts techniques sont observés, ils devront être réglés.
Si le domaine technique présente des non-conformités flagrantes, des équipements vieillissants nécessitant l’intervention régulière d’opérateurs, … L’organisation ne peut pas tout faire en claquant des doigts.
Y compris lors d’un changement de cap volontaire et dynamique, les moyens financiers ne sont pas inépuisables et la conformité / remplacement de matériel peut prendre du temps.
Il est, dans ce cas, important d’agir avec une transparence certaine pour expliquer ce qui est fait dans le cadre d’un rétroplanning par ex.
5 – Ensuite et peut-être enfin, je travaillerai à la mise en place de routines pour les différentes strates de l‘entreprise.
Que l’on soit dirigeant ou opérateur de premier rang, les sujets de santé et de sécurité au travail sont rarement innés, il faut donc les évoquer régulièrement et tenter, régulièrement, d’en faire un événement.
- Les dirigeants sont-ils informés de chaque accident avec arrêt ? ou a minima, de chaque accident grave (si l’organisation a une définition ?)
- Une communication régulière est-elle organisée qu’elle soit liée à des événements internes ou externes et un retour d’expériences de bonne pratique ou d’accident.
- Des « tous sécurité » sont-ils organisés régulièrement ?
- Le personnel est-il revu périodiquement en formation / échange sur les sujets de S&ST ?
- …
Tout événement étant la conséquence de divers enchainements. Je ne peux que conseiller (et c’est ce que j’espère avoir fait ci-dessus) à mon lecteur d’avoir une vision globale de la situation et ne pas s’arrêter aux accidents et incidents constatés trop régulièrement (l’analyse des ENS reste cependant un incontournable).
Ces propositions sont limitées à une vision très générale sans détail de l’organisation. Chacun de ces items est à inscrire dans un schéma classique d’amélioration continue.
A l’instar d’autres activités, la prévention des risques professionnels souffre trop souvent d’un manque de mesure fiable des actions menées alors que le dirigeant a besoin d’indicateurs pour se rassurer sur l’efficacité de ce qu’il soutient.
Une erreur serait de vouloir former tous les opérateurs de premier rang aux règles générales de sécurité sans s’intéresser aux encadrants dont principalement l’équipe de direction. Ce serait là, une perte d’argent et de temps.
Pour faire le parallèle avec mon activité, j’ai récemment refusé une intervention auprès de chefs d’équipes tout simplement parce que la ligne directrice de l’entreprise en S & S T n’était pas tracée par le dirigeant. Après quelques discussions, il s’avère que je commencerai avec le CODIR de ce Groupe dans 2 mois avant d’envisager toute autre action.
Je reste convaincu que les ingrédients pour performer en santé et sécurité au travail sont quasi identiques quelque soit le domaine d’activité. Le moule (la culture de l’entreprise, son histoire, ses personnes) étant différents, le dosage des ingrédients et leur incorporation peuvent varier en quantité et dans le temps.
@ votre écoute
Jérôme
Hello !
Pour l’audit sur tu proposes moi j’aurais simplement envisagé un audit du mode de management S&ST de cette entreprise (sur la base de l’ILO-OSH pour a part) et je me serais aussi intéressé aux X (dix ?) derniers AT ou MP survenus (car je ne connais pas le monde des forages pétroliers).
A+
merci de ton retour, la demande que j’ai eu était très générale, j’ai donc balayé large. Il me semblait dans cette demande que le management était peu présent. Pour la sinistralité, c’est une évidence et c’est indispensable.
bon WE
Jérôme